Le Musée des Beaux-Arts de Draguignan change de nom. Longtemps il s’est appelé musée d’Art et d’Histoire et précédemment musée municipal ; ce glissement sémantique est révélateur d’une nouvelle manière d’envisager et de présenter les collections au prisme de l’histoire de l’art, néanmoins il a longtemps été le seul musée de la ville, avant la création du musée de l’Artillerie inauguré en 1982 et de celui des Arts et Traditions populaires en 1985.
À ce titre il a reçu sans distinction, comme dans la plupart des musées créés au XIXe siècle, l’ensemble des collections patrimoniales de la ville et de son territoire. Celles-ci sont de natures variées et ont fait l’objet de peu d’études récentes. Les derniers catalogues datent du début du XXe siècle et, dès les années 1930, on se plaignait qu’ils n’étaient plus à jour. Aussi ces collections ont-elles peu attiré l’attention des historiens de l’art et ont-elles peu été prêtées. Leur constitution s’inscrit dans un contexte historique, social et culturel qui est celui d’une ancienne préfecture de département, déclassée en 1974 mais qui était déjà parmi les moins peuplées de France. Essentiellement réalisées par des dons, les acquisitions sont liées à une notabilité locale plus sensible à l’archéologie, l’histoire et l’histoire naturelle qu’aux beaux-arts, ce qui se reflète dans la sociabilité
savante de la ville cristallisée dans la société d’études de Draguignan fondée en 1855. En outre, dès le départ, le musée a été considéré comme une dépendance de la bibliothèque. Les mêmes donateurs gratifiaient fréquemment les deux établissements et, de fait, les problématiques très pratiques d’espace, d’entretien des locaux et de personnel étaient communes. L’émancipation muséale qui s’est faite ailleurs au XIXe siècle a été très tardive à Draguignan puisque les deux institutions jumelles ont partagé les mêmes locaux jusqu’à il y a dix ans, et pendant un siècle et demi le conservateur de la bibliothèque était aussi celui du musée. Les dons et achats ont surtout été faits au bénéfice d’autres collections que la peinture, laquelle n’a longtemps été qu’une section mineure du musée.
Aussi le changement de nom est-il la manifestation d’un choix stratégique qui s’inscrit dans un changement de paradigme mais ne peut dispenser d’un regard rétrospectif plus large. Trois périodes doivent être distinguées, liées à la fois aux bâtiments destinés à la présentation des collections municipales et à la personnalité de ceux qui les ont fait vivre et en ont assuré la conservation.